Agriculture biologique,
Sol
Dernière mise à jour le 31 mars 2025
La réduction du travail du sol en bio est devenue un sujet récurrent. On entend souvent que le labour en bio est systématique alors que certains producteurs cherchent à concilier bio et travail réduit du sol. Et si on faisait le point sur l’état de nos connaissances ?
Nos collègues de la Chambre d’agriculture de Normandie et leurs partenaires, dans le cadre du programme Reine Mathilde, ont réalisé un essai comparatif de systèmes labour / non-labour en bio durant 5 années (2019-2023) sur deux rotations. L’essai a été mis en place dans le Calvados, sur un limon sablo-argileux profond. L’essai a commencé après prairie temporaire sur chacune des deux rotations dont la destruction a été gérée soit par un labour soit par des passages répétés d’outils (déchaumeurs, outils animés ...).
Durant les 5 ans, plusieurs indicateurs ont été observés ; notamment, l’activité biologique, la stabilité structurale, le reliquat d’azote, le salissement, le rendement, le temps de travail ou encore la marge semi-nette (qui prend en compte les charges opérationnelles et de mécanisation). Nous vous présentons les résultats sur la rotation « cultures de vente ».
L’itinéraire sans labour a présenté des reliquats azotés plus importants (+25 % d’azote) que sur l’itinéraire labour. Quelques hypothèses tentent d’expliquer ce phénomène : moins de lessivage, des cultures qui absorbent moins d’azote en non-labour ou encore une meilleure activité biologique hivernale.
Le non-labour a également présenté l’avantage d’être moins consommateur de carburant, sauf l’année de destruction de la prairie, de part un nombre de passages de travail du sol moins élevé et un temps de travail réduit par rapport au labour. Sans surprise, la rotation sans labour bénéficie d’une meilleure stabilité structurale, notamment en surface.
En revanche, la densité des adventices est toujours plus importante en non-labour. Sur les cultures de maïs et de blé, 2 à 4 fois plus d’adventices ont été relevés. Dans les associations étouffantes, on constate également + 15 à +20 % d’adventices. Les vivaces (chardons, rumex, laiterons des champs) dominent dans les parcelles de non-labour.
De manière surprenante, les comptages ont montré une présence plus faible des vers de terre endogés dans le système sans labour. Cependant, sur les 5 années d’essai, la population d’endogés a progressé sur les deux systèmes. Les comptages ont également montré un nombre équivalent d’anéciques. La biomasse microbienne est plus élevée en non-labour ; ainsi que les limaces.
L’essai nous apprend également que les cultures sans-labour sont plus vigoureuses même si elles sont souvent moins denses. Le rendement des différentes cultures sans labour a été équivalent à celui avec labour dans 5 cas sur 15, supérieur dans 2 cas sur 15 (blé la première année) et inférieur dans 8 cas sur 15.
Pour ce qui est du résultat économique, en traitant toutes les parcelles observées sur les 5 ans et pas seulement celles mentionnées dans le tableau ci-dessus, les marges semi-nettes sont favorables au labour la première année car il y a moins de passages pour la destruction de la prairie. Cependant, en deuxième et troisième année, la tendance s’inverse et les marges sont légèrement plus élevées en non-labour.
Cet essai confirme certains impacts du non-labour par rapport à un système labouré ; par exemple, une présence d’adventice plus importante et croissante, une plus forte sensibilité aux conditions humides, une meilleure stabilité structurale. L’essai démontre également des effets inattendus comme un nombre de vers de terre moins nombreux en non-labour ou des cultures plus vigoureuses les premières années. Certains impacts sont très variables et posent questions ; notamment la marge économique qui varie selon les années et la position de la culture
dans la rotation.
En conclusion, la viabilité du système sans labour est fragile, au regard du salissement. Ainsi, il est plutôt recommandé de pratiquer le labour lorsque la parcelle le nécessite (salissement, tassement…) plutôt que systématiquement ou de le bannir complètement.
Pour en savoir plus, vous pouvez retrouver le webinaire de présentation des résultats sur la chaine Youtube de Vers de Terre Production !